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Dans le woreda (district) de Dassenech, dans le sud de l'Éthiopie, Enat (son nom a été modifié), 13 ans, a été contrainte de quitter l'école et d'épouser un étranger pour aider sa famille à faire face à la sécheresse.
Dans le woreda (district) de Dassenech, dans le sud de l'Éthiopie, Enat (son nom a été modifié), 13 ans, a été contrainte de quitter l'école et d'épouser un étranger pour aider sa famille à faire face à la sécheresse. ©UNICEF/UN0651316/Pouget

Corne de l'Afrique : les mariages des enfants en hausse alors que la sécheresse s'intensifie

Nairobi, le 29 juin 2022 – Dans la Corne de l’Afrique, un nombre alarmant de filles âgées d’à peine douze ans sont contraintes de se marier et de subir des mutilations génitales féminines (MGF), alors que la sécheresse la plus grave depuis quarante ans pousse les familles à bout.

Dans les régions d’Éthiopie les plus touchées par la sécheresse, les mariage des enfants ont en moyenne plus que doublé en l’espace d’un an, selon l’analyse de l’UNICEF. Le nombre d’enfants risquant d’abandonner l’école en Éthiopie, au Kenya et en Somalie, en raison de l’impact de la crise, a triplé en trois mois – laissant un grand nombre d’adolescentes exposées à un certain nombre de risques liés à la protection de l’enfance, notamment les mutilations génitales féminines et le mariage forcé.

Dans toute la Corne de l’Afrique, les familles sont confrontées à des choix désespérés pour survivre alors que la sécheresse, due au changement climatique, assèche les sources d’eau et tue le bétail, et que l’effet domino de la guerre en Ukraine exacerbe la spirale des prix des denrées alimentaires et des carburants. Plus de 1,8 million d’enfants ont désespérément besoin d’un traitement contre la malnutrition aiguë sévère, qui met leur vie en danger, et 213 000 personnes sont désormais considérées comme menacées par la famine en Somalie, selon Famine Early Warning Network. De plus en plus de parents ou d’accompagnants marient des filles pour obtenir une dot qui aidera à soutenir le reste de la famille, pour avoir une bouche de moins à nourrir ou pour tenter d’aider la mariée à entrer dans un ménage plus aisé.

Du droit à l’enfance

«Nous constatons des taux alarmants de mariages d’enfants et de mutilations génitales féminines dans toute la Corne de l’Afrique – certaines familles démunies s’arrangent pour marier des filles d’à peine douze ans à des hommes plus de cinq fois plus âgés qu’elles», déclare Andy Brooks, conseiller régional de l’UNICEF pour la protection de l’enfance en Afrique orientale et australe.

«Le mariage d’enfants et les mutilations génitales féminines mettent fin à l’enfanceen poussant les filles à quitter l’école et en les rendant plus vulnérables à la violence domestique et à la pauvreté. Les chiffres dont nous disposons ne rendent pas compte de l’ampleur du problème : de grandes parties de la Corne de l’Afrique ne disposent pas de structures spécialisées où les cas peuvent être signalés. Il s’agit d’une crise des enfants, et nous avons besoin de toute urgence de fonds supplémentaires pour intensifier notre action en Éthiopie, au Kenya et en Somalie – non seulement pour sauver des vies à court terme, mais aussi pour les protéger à long terme. »

Des chiffres en dessous de la réalité

Les données sur le mariage des enfants et les mutilations génitales féminines sont limitées, en raison d’un manque de rapports et de services dans la région. L’analyse par l’UNICEF des données gouvernementales disponibles et des évaluations humanitaires a révélé ce qui suit :

  • Dans toute la région de la Corne de l’Afrique, un nombre croissant de filles risquent de quitter l’école à mesure que la crise s’aggrave, ce qui les expose davantage au mariage des enfants et aux mutilations génitales féminines. Le nombre d’enfants risquant d’abandonner l’école en Éthiopie, au Kenya et en Somalie en raison de l’impact de la sécheresse a triplé en l’espace de trois mois, passant de 1,1 million à environ 3,3 millions d’enfants.
  • En Éthiopie, selon des sources gouvernementales locales, les mariages d’enfants ont augmenté en moyenne de 119% dans les régions les plus touchées par la sécheresse – Somali, Oromia et la région des nations, nationalités et peuples du Sud (SNNP) – entre janvier et avril 2021 et la même période en 2022. Dans le même laps de temps, les cas de MGF dans la région SNNP ont augmenté de 27%. En raison de l’impact de la sécheresse, les dots en espèces, en nourriture et en bétail diminuent, ce qui signifie que les familles peuvent envisager de marier encore plus de filles. La crise chasse également les gens de chez eux, y compris les travailleurs sociaux et communautaires qui aidaient les familles à protéger les filles contre le mariage des enfants et les MGF.    
  • Lors d’une évaluation réalisée en janvier au Somaliland, près d’un quart des personnes interrogées ont signalé une augmentation de la violence sexiste due à la sécheresse, notamment le mariage d’enfants, la violence domestique et la violence sexuelle, avec des augmentations de plus de 50% dans certains endroits. Une autre évaluation des besoins humanitaires au Puntland en février a révélé que le mariage d’enfants représentait 59% des cas signalés aux prestataires de services, dont beaucoup impliquaient également des MGF.
  • Au Kenya, les filles sont également confrontées à des risques accrus de mariage d’enfants et de MGF. Quatorze des vingt-trois comtés touchés par la sécheresse sont déjà des hauts lieux des MGF, avec des taux de prévalence atteignant 98%. Les filles de ces régions risquent désormais d’être excisées à un plus jeune âge, car les familles les préparent au mariage. On signale également que des filles vivant dans les régions frontalières sont emmenées dans les pays voisins pour y subir des MGF, ou sont mariées à des hommes plus âgés dans les pays voisins, où les taux de MGF peuvent être plus élevés.
  • Dans toute la région, les femmes et les filles des zones touchées par la sécheresse doivent parcourir de plus longues distances à pied pour accéder à l’eau et à d’autres ressources de base, ce qui les rend vulnérables aux violences sexuelles. Au Kenya, selon une analyse de la Croix-Rouge kenyane, les femmes et les filles marchent trois fois plus longtemps qu’avant, jusqu’à 30 km dans certains endroits.

La guerre en Ukraine, un facteur aggravant

Dans toute la Corne de l’Afrique, quatre saisons des pluies ont échoué en l’espace de deux ans, et les prévisions indiquent qu’une cinquième saison des pluies, d’octobre à décembre, risque également d’échouer.

La guerre en Ukraine accélère la crise. À elle seule, la Somalie importait autrefois 92% de son blé de Russie et d’Ukraine, mais les lignes d’approvisionnement sont désormais bloquées. La montée en flèche des prix des denrées alimentaires signifie également que les familles ne peuvent pas se permettre d’acheter des produits de base.

L’UNICEF s’efforce d’étendre les services de protection de l’enfance et de lutte contre la violence sexiste afin de répondre aux besoins croissants de protection des femmes et des enfants vulnérables dans la Corne de l’Afrique. Il s’agit notamment de mettre en place des programmes communautaires visant à réduire les risques de violence, d’exploitation, d’abus et de mariage d’enfants, et de fournir des services pour aider les femmes et les enfants à se remettre de la violence.

L’UNICEF demande que les services de protection de l’enfance et de lutte contre la violence liée au sexe soient étendus de toute urgence, notamment par le biais de services permanents et d’équipes mobiles pour atteindre les plus vulnérables. Cependant, l’appel de l’UNICEF pour la sécheresse dans la Corne de l’Afrique est financé à moins d’un tiers.

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