Un récit comme tant d’autres dans ce pays dévasté par la sécheresse. Il n’a pas plu depuis plus de deux ans. Les agriculteurs ont perdu leur récolte et leur bétail. De toutes les régions de Somalie, bravant l’insécurité, les familles marchent vers les centres urbains dans l’espoir d’y trouver une aide, de la nourriture et des soins de santé. Lorsqu’ils atteignent les faubourgs des villes, à Mogadiscio ou Dollow, les enfants sont épuisés et affamés. Ils rejoignent des villages de tentes réservés aux personnes déplacées, dans lesquels ils s’installent, avec en tête l’espoir d’un possible retour.
En raison de la sécheresse, Fatuma et ses cinq enfants, dont Salat, 10 ans, ont quitté leur village de Malagda. Ils marchaient depuis trois jours lorsqu’ils sont arrivés à Baidoa, au camp de Hagarka pour personnes déplacées, l’un des sites d’installation soutenus par l’UNICEF où ils ont pu accéder à des services de santé, de nutrition et d’eau, d’assainissement et d’hygiène vitaux. Mais Salat était trop fragile. Elle est morte le lendemain de leur arrivée au camp.
« Je ne pouvais rien faire pour Salat, elle était devenue très faible en venant ici « , dit sa mère Fatuma. « Elle est morte de faim parce que nous n’avions pas assez de nourriture ; je n’ai même pas pu faire son deuil car je devais trouver de la nourriture pour mes autres enfants. »
« Beaucoup de personnes que nous prenons en charge viennent des camps de déplacés ou d’autres centres de santé. Avec la sécheresse, le nombre d’enfants admis a augmenté. Ici nous admettons les cas compliqués, c’est-à-dire les enfants souffrant de dénutrition et de maladies associées, pneumonies, diarrhées aigües, choléra, Kwashiorkor », raconte le Dr Mohamed Afsia, médecin à l’hôpital de Benadir proche de Mogadiscio.
La Somalie, frappée de plein fouet par la sécheresse et la malnutrition
La Somalie connaît actuellement une période de sécheresse historique et l’on prévoit une cinquième saison des pluies consécutive sans pluie, une situation qui n’a pas été observée depuis plus de quatre décennies. 90 % du pays connaît des conditions de sécheresse sévère à extrême. Cette calamité exceptionnelle, combinée à l’intensification des conflits et à la hausse des prix alimentaires, a aggravé la situation humanitaire.
Selon nos estimations, 1,7 million d’enfants de moins de 5 ans pourraient souffrir de malnutrition aiguë en 2024. 1 habitant sur 5 est exposé à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire et plus de 800 000 sont en situation d’urgence alimentaire.
Les besoins spécifiques de la population somalienne touchée par la famine
6,7 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire grave
6,5 millions de personnes n’auront plus accès aux services de santé essentiels
Avant la fin du mois de juin 2023, on estime que 1,8 million d’enfants de moins de 5 ans souffriront d’émaciation, dont plus de 513 000 probablement atteints d’émaciation sévère
En 2022, le nombre de personnes touchées par la sécheresse a plus que doublé, passant de 3,8 millions de personnes à 7,8 millions. Sur la même période, les déplacements internes ont plus que quintuplé et concernent aujourd’hui 1,3 millions de personnes. Les besoins sont donc considérables et continuent d’augmenter. L’accroissement de l’aide humanitaire a, à ce jour, permis de repousser une déclaration officielle de famine mais les prévisions sont pessimistes pour la période d’avril à juin 2023.
C’est une course contre la montre
Les équipes sur le terrain et leurs partenaires ne se résignent pas et agissent sur tous les fronts pour assister les populations les plus fragiles : distributions d’aliments thérapeutiques aux enfants, aide alimentaire, fournitures de kits d’hygiène, programmes WASH pour fournir des accès à l’eau potable, santé et accès aux soins, éducation, appui aux écoles, soutiens financiers aux familles.
Les enfants ont besoin de vous