Des dizaines de milliers d’enfants et de jeunes ont été enrôlés dans des groupes armés au Soudan du Sud. UNICEF intervient au quotidien pour libérer ces enfants-soldats et faire en sorte de leur donner un avenir.
James avait 13 ans quand il a été enlevé au Soudan du Sud. Retenu prisonnier pendant trois ans, il a été forcé à se battre. Après avoir reçu un tir dans la jambe, il a été laissé pour mort par le groupe armé qui l’avait capturé. Le jeune garçon a pu être ramené à Djouba auprès de sa famille. Mais les cicatrices physiques et psychiques de son passé d’enfant-soldat demeurent.
« J’ai pu être aidé psychologiquement, ça m’a aidé. Maintenant, quand on m’énerve, j’arrive à répondre calmement, sans violence. Je suis heureux d’avoir retrouvé ma famille, mais ils ont besoin que je prenne soin d’eux et il n’y a que très peu d’opportunités ici. Les gens cherchent à vous prendre tout ce qu’ils peuvent. Les cambriolages sont ce que je redoute le plus : tout perdre à nouveau… Je ne dors pas la nuit, je m’inquiète pour ma mère et mes sœurs. Il n’y a que l’éducation qui puisse nous aider. J’ai appris à lire et à écrire. Mon sujet préféré, ce sont les sciences : je veux devenir docteur. J’ai essayé d’oublier tout ce qui est arrivé. Si je continue à penser à ce qui s’est passé, je vais devenir fou. Mais je regarde de l’avant. Je veux m’améliorer, je veux devenir un leader, je veux construire une école et travailler dans un hôpital. »
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David : « Il n’y avait personne pour m’aider »
David avait 14 ans quand il a été enlevé par un groupe armé au Soudan du Sud.
« J’étais à la maison avec ma mère quand huit hommes armés ont fait irruption. Ils ont dit qu’ils ne partiraient pas sans moi. Quand ils sont repartis en m’emmenant, ma mère a commencé à hurler et à pleurer. Mes frères ont appris mon enlèvement et sont venus voir ma mère. Des hommes armés sont revenus à la maison et les ont tués. »
David a été emmené dans un camp militaire.
« Ils m’ont amené jusqu’à leur chef, qui m’a demandé si je voulais travailler ou rentrer chez moi. On m’avait dit de dire que je voulais travailler, sinon on me torturerait. On m’a donné une arme et un uniforme. »
Après une semaine d’entraînement, les combats ont commencé. « J’avais peur, mais je devais me montrer fort pour ne pas sombrer. Quand j’y repense, je ne me sens pas bien face à ce que j’ai fait. Je n’aimais pas enlever des gens, surtout quand ils nous suppliaient ou qu’ils pleuraient, mais il n’y avait personne pour m’aider et je devais obéir aux ordres. »
David est parvenu à s’échapper, mais il n’a jamais pu retrouver sa famille : « Je ne peux pas rentrer à la maison car le groupe armé continue à patrouiller dans ma région. »
Le jeune homme a été placé dans une famille d’accueil par UNICEF. Il apprend un métier et prépare son avenir.
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Rose : « Je n’arrive pas à me sortir ce souvenir de la tête »
Rose vivait avec son mari quand elle a été enlevée à l’âge de 17 ans.
« Un soir, des soldats ont frappé à notre porte et mon mari a pris la fuite. Ils étaient armés et ils m’ont attaché les mains avec une corde. Nous étions une cinquantaine de personnes ainsi capturées. Ils nous ont ordonné de porter des choses et nous devions courir. Si on ralentissait, ils nous frappaient à coups de bâtons. Je suis tombée à un moment et ils m’ont tellement battue que j’ai failli en mourir. »
Une fois dans le camp, Rose est tombée malade. En plus des coups, elle a été harcelée et violée par des soldats.
« Certains m’ont demandé d’être leur petite amie et ils m’ont frappée quand j’ai dit non. Ensuite, l’un d’eux m’a violée après que j’ai refusé. Il m’a menacée à bout portant et je n’arrive pas à me sortir ce souvenir de la tête. J’étais obligée de le revoir, il ne me laissait jamais tranquille. »
Une fois que les soldats ont compris qu’elle était trop malade pour se battre, ils l’ont relâchée. Elle est en convalescence dans un centre UNICEF mais son avenir est incertain.
Elle vit dans un Centre de transit, pendant que des équipes UNICEF font le nécessaire pour la soutenir. Lorsqu’elles sont enrôlées dans des groupes armés, les filles sont particulièrement touchées par des agressions sexuelles et des abus.
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Marc : « Je dormais la peur au ventre tous les soirs »
Marc a été enlevé et retenu pendant trois mois par un groupe armé.
« Il faisait nuit quand ils sont venus. J’ai entendu des gens dehors. Je croyais que c’était mes amis, mais quand j’ai ouvert la porte, on m’a pointé une arme dessus. J’avais très peur, j’ai cru qu’ils allaient me tuer. »
Marc a été emmené dans un camp loin de son village. Après un entraînement basique, il a dû participer à plusieurs attaques.
« On nous faisait tirer. Je n’avais pas le choix. J’ai vu des gens mourir et ça m’a marqué. Le bruit des tirs était tellement assourdissant, j’avais l’impression de devenir fou. On nous forçait à faire des choses horribles. Certains jeunes mourraient parce qu’ils n’avaient pas assez de nourriture. Ils étaient devant moi quand ça arrivait. Dans notre culture, on nous apprend à ne jamais enjamber de cadavres, mais les chefs nous y obligeaient parce qu’il n’y avait pas de temps pour les enterrer. J’avais peur que ce soit moi le jour suivant. Je dormais la peur au ventre tous les soirs, en me serrant contre mon arme. »
Après une attaque, Marc a saisi sa chance et s’est échappé.
« Sur le chemin du retour, on s’est arrêtés dans un camp près de mon village. Je suis allé chercher de l’eau. J’ai laissé tomber mon seau et j’ai commencé à courir. »
Marc est arrivé dans un foyer pour anciens enfants soldats. Pourtant, même en sécurité, il continue à être hanté par son passé.
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Gabriel : « Je suis maintenant aveugle d’un œil »
Gabriel avait 15 ans lorsqu’il a été enlevé par un groupe armé au Soudan du Sud.
« J’étais en chemin vers la ferme de ma famille quand on m’a enlevé. Cinq personnes armées ont surgi. J’ai cru qu’on allait me tuer. On m’a donné une arme et on m’a entraîné à l’assembler, à la démonter et comment tirer. On nous a fait passer des tests, et on était punis quand on échouait. On en a tous souffert, tout le monde recevait des coups. »
Gabriel a également dû dérober de l’argent à des civils pour financer le groupe.
« On nous disait d’aller voir des fermiers et de leur ordonner de nous donner à manger. S’ils refusaient, on devait les torturer. Je n’ai jamais voulu faire ça. »
La première expérience de guerre de Gabriel est survenue avant même la fin de son entraînement.
« On préparait à manger quand on a entendu des tirs. Avec les autres jeunes qui s’entraînaient, on ne savait pas quoi faire. J’ai couru et je me suis caché mais il y avait beaucoup de déflagrations. J’ai été touché par des éclats au visage et je suis maintenant aveugle d’un œil. Après les tirs, on nous a transportés jusqu’à l’hôpital où les soldats nous ont abandonnés. »
Gabriel vit maintenant avec sa famille et apprend à devenir un électricien. Mais le traumatisme psychologique demeure.
« Je suis libre maintenant. La plupart du temps, je vais bien, surtout quand je suis en formation pour devenir électricien. Mais j’ai toujours des cauchemars au sujet des combats. C’est comme si je les revivais : les odeurs, les bruits, la violence… C’est terrifiant. Le travail en atelier m’aide à me concentrer et ça me redonne de l’espoir. Mon espoir, c’est de pouvoir travailler en tant qu’électricien et d’aider mon père. »
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Plus de 900 ont été libérés depuis le début de l’année 2018, mais on estime que 19 000 enfants sont encore entre les mains de groupes armés. UNICEF intervient auprès du gouvernement et de ces milices pour que plus aucun enfant au Soudan du Sud ne soit un soldat.