A l’occasion de la Journée nationale de lutte contre le harcèlement, UNICEF France publie les résultats de sa 4e Consultation nationale des 6-18 ans. Interrogé.e.s sur les relations entre les filles et les garçons et la perception des droits tels qu’ils sont vécus selon que l’on est une fille ou un garçon, ils.elles sont un nombre record de 26 458 enfants et adolescent.e.s à avoir répondu aux 165 questions sur leur vie en France métropolitaine et Guyane.
Paris, le 8 novembre 2018 – Leurs réponses passionnantes ont été analysées par Serge Paugam, sociologue et Edith Maruéjouls, géographe du genre, avec Catherine Dolto, haptothérapeute. Illustré par Lisa Mandel, le rapport met en évidence les formes de moqueries et harcèlement qui les concernent tous, filles et garçons et, au-delà, les inégalités et discriminations spécifiques auxquelles doivent faire face les filles dès le plus jeune âge.
L’école, la séparation des sexes
L’enquête montre que les enfants et les adolescent.e.s sont nombreux à faire l’expérience de moqueries, de discriminations ou de harcèlement. Ces formes de violence renforcent les poids des inégalités sociales car ce sont souvent les enfants ou les adolescent.e.s les plus défavorisé.e.s qui en sont la cible.
Plus de 30 % des enfants et adolescent.e.s déclarent avoir été victimes de moqueries et d’attaques blessantes à l’école. A 7-8 ans, 1 enfant sur 2 s’en plaint. Les garçons en primaire sont les plus touchés par ce type d’épreuve qui concerne moins les filles, mieux intégrées au milieu scolaire. La cour de récréation illustre la séparation des sexes à l’école, notamment en primaire, par la place qu’occupent les filles et les garçons : les garçons au large et au centre, les filles sur le côté.
L’amitié entre les filles et les garçons ne semble pas aller de soi : ils.elles sont 40 % à déclarer ne pas avoir au moins un ami du sexe opposé. Autre sujet de tension : l’homophobie. Les filles apparaissent nettement plus ouvertes à l’homosexualité que les garçons, ils.elles sont 45 % entre 13 et 18 ans à ne pas indiquer clairement que « l’on peut aimer qui on veut et que l’amour entre filles et l’amour entre garçons est le même amour qu’entre une fille et un garçon ».
La prise de conscience des inégalités dès la préadolescence
Le lieu d’habitation reste le facteur déterminant pour expliquer les inégalités et les privations ressenties. Mais le fait d’habiter dans un quartier populaire ou prioritaire ou encore d’avoir des parents au chômage a un effet plus fort pour les filles que pour les garçons. Les réponses montrent que pour quasiment toutes les formes de privations, dans un même quartier populaire ou prioritaire, elles sont plus impactées par l’effet social : moins d’accès aux savoirs, à la santé, aux loisirs, à la sociabilité…
De manière générale, les filles perçoivent cette différence mais en prennent conscience avec l’âge : elles sont 45 % à considérer qu’elles ont moins de droits que les garçons contre 30 % des garçons qui pensent le contraire. Cette perception se renforce à la préadolescence pour atteindre 65 % chez les filles à 17 ans.
Des filles deux fois plus harcelées
Que ce soit sur internet, dans les transports en commun ou dans l’espace public, l’enquête montre que les filles sont deux fois plus harcelées que les garçons. Une fille sur 10 déclare avoir subi une forme d’insulte ou de harcèlement dans l’espace public. Elles subissent surtout davantage de discriminations liées à la tenue vestimentaire qui concerne globalement 19 % des 15/18 ans. En réponse, les filles restent davantage confinées dans l’espace domestique ou dans les lieux où elles se sentent en sécurité, laissant l’espace public aux garçons.
Internet : frustration et mauvaises rencontres
L’enfance est désormais connectée : plus de 62 % communiquent par internet avec leurs amis, 58 % sont présent.e.s sur un réseau social. Mais cette virtualité engendre des frustrations : ils.elles sont seulement 40 % à se considérer valorisé.e.s par ces échanges. Plus grave, 9,5 % déclarent avoir été agressé.e.s ou harcelé.e.s sur les réseaux, avec un maximum à 24 % chez les adolescent.e.s de 18 ans. Enfin, ils.elles sont exposé.e.s à des images qui les choquent : 38 % voient des images qui leur font peur, 24 % déclarent avoir déjà vu des images pornographiques.