Alors qu’une nouvelle ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse vient d’être nommée, l’UNICEF France s’apprête à publier un rapport révélateur sur la situation d’au moins 77 433 enfants et jeunes allophones en France, dont la langue première n’est pas le français.
Ces élèves, qui devraient jouir du droit fondamental à l’éducation, rencontrent de nombreux obstacles qui compromettent leur réussite scolaire. À l’occasion de la journée nationale du refus de l’échec scolaire, l’UNICEF France appelle à une mise à l’agenda urgente et ambitieuse de ce dossier, souvent négligé au sein de ses politiques éducatives.
Un sujet sous-exploré et négligé
Le rapport intitulé « Dans toutes les langues : réussir à l’école quand on ne maîtrise pas le français » met en lumière l’insuffisance des dispositifs de soutien linguistique pour les élèves allophones, malgré les efforts des professionnels. Ces dispositifs, tels que les UPE2A (Unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants), sont essentiels mais montrent leurs limites face aux besoins croissants des élèves.
Nombreux sont ceux qui, pour des raisons administratives, géographiques ou temporelles, n’ont pas accès à un soutien adéquat. Alors que de plus en plus d’élèves allophones intègrent le système éducatif français (+20% entre 2019-2020 et 2020-2021), l’offre de soutien linguistique proposée par l’école française n’a pas été réformée depuis plus de 10 ans, les données collectées sont insuffisantes, et les budgets dédiés n’ont pas augmenté.
« La situation des élèves allophones est un sujet trop souvent mis à l’écart dans les débats sur l’éducation. Pourtant, leur intégration réussie est cruciale pour notre système éducatif et pour l’harmonie sociale. La négligence de ces questions perpétue des inégalités et des obstacles à leur réussite scolaire », souligne Jean-Paul Delahaye, Inspecteur général honoraire de l’Éducation nationale et conseiller scientifique de l’UNICEF France, qui a préfacé le rapport.
Un système éducatif peu adapté à la diversité linguistique
En France, un tiers des enfants et jeunes parle une autre langue que le français à la maison. Cependant, les politiques éducatives françaises ne valorisent que très peu cette richesse linguistique. Selon l’OCDE, seulement 8 % des enseignants français se sentent bien préparés pour enseigner dans des environnements multiculturels ou plurilingues, un chiffre bien inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE de 26 %.
Le rapport recommande d’adopter une approche plus proactive et inclusive en matière d’enseignement des langues premières des élèves. Il plaide également pour une réforme des
pratiques pédagogiques, en particulier dans les territoires ultramarins, où les besoins en matière d’allophonie sont accrus.
Appel à une action immédiate pour une école plus inclusive
L’UNICEF France appelle à un plan ministériel ambitieux pour l’accueil et la réussite des élèves allophones, articulé autour de cinq grands objectifs. Le rapport propose 17 mesures essentielles, notamment :
- Réformer les dispositifs de soutien linguistique pour améliorer leur accessibilité, leur qualité et leur durée.
- Promouvoir l’intégration des élèves allophones en milieu ordinaire, pour construire une école réellement inclusive.
- Former les enseignants pour intégrer efficacement toutes les langues premières dans leurs pratiques pédagogiques.
- Développer l’enseignement bilingue immersif dans les territoires ultramarins et reconnaître davantage les langues des élèves.
« Le droit à l’éducation implique non seulement l’accès à l’école, mais aussi d’offrir aux élèves les moyens de réussir. J’appelle la ministre Anne Genetet, ainsi que son ministre délégué à la réussite éducative, Alexandre Portier, à mettre ce sujet à l’agenda et à prendre des mesures concrètes pour soutenir les élèves allophones. Leur réussite est essentielle pour garantir une éducation équitable et inclusive », affirme Adeline Hazan, présidente de l’UNICEF France.
Accéder à la synthèse du rapport ICI