Aujourd’hui 9 mai et demain 10 mai 2023, les experts de l’ONU interrogeront la délégation du Gouvernement français à Genève sur l’application des différents droits de la Convention des droits de l’enfant et sur les solutions qu’il compte apporter aux différentes violations constatées.
Paris, le 9 mai 2023 – L’UNICEF France, en tant qu’observateur, a déjà remis deux rapports (2020 et 2022 au Comité des droits de l’enfant) et a été auditionné par cette instance le 6 février 2023. L’UNICEF France a mis l’accent sur de nombreux manquements et espère que les recommandations formulées en juin permettront d’obtenir des avancées.
« 0 enfant à la rue »
Alors que le Gouvernement annonçait, en octobre dernier, un objectif de 0 enfant à la rue, 1 559 enfants étaient toujours sans solution d’hébergement, à la rue ou dans des abris de fortune le 20 mars 2023. Face à cette situation, l’UNICEF France exhorte le Gouvernement à favoriser le développement de réponses structurelles adaptées, permettant de sortir de la logique d’urgence et à prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant en adoptant une programmation pluriannuelle de l’hébergement et du logement incluant une attention spécifique sur les enfants et les familles.
Plus généralement, l’UNICEF France recommande de se saisir du Pacte des Solidarités pour structurer et mettre en œuvre une politique ambitieuse en matière de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale et des enfants.
Santé mentale des enfants et des jeunes
Depuis la pandémie de Covid-19 et l’explosion des besoins en termes d’accompagnement et de suivi psychiques des enfants et des adolescents, seule une feuille de route sur la santé mentale, pilotée par le ministère de la Santé, a été mise en place sans qu’elle soit dédiée spécifiquement aux enfants, et sa programmation calendaire, comme son évaluation, restent insuffisantes. Face à l’augmentation des besoins, l’UNICEF France recommande d’élaborer une stratégie nationale pour la santé mentale des enfants, avec une attention spécifique sur les enfants les plus vulnérables, afin de garantir plus de transversalité et d’inter-ministérialité. Cela doit s’accompagner d’un renforcement de l’attractivité des métiers de la pédopsychiatrie et d’une mise en place de dispositifs complémentaires de détection et de suivi par les médecins généralistes formés, les psychologues et les infirmiers en pratique avancée.
Droit à l’éducation
En Guyane française, notamment du fait d’un manque de structures scolaires de proximité et d’un manque de dispositifs de transport et d’hébergement adaptés pour les élèves des communes isolées, on estime à près de 10 000 le nombre d’enfants non-scolarisés. Pour les jeunes des communes isolées, contraints de vivre dans des familles hébergeantes, des internats ou chez des tiers, les conditions de vies sont parfois alarmantes. L’UNICEF France recommande d’initier une réforme en profondeur du dispositif des « familles hébergeantes », piloté par la collectivité territoriale de Guyane, pour améliorer la qualité de l’accueil et le contrôle des agréments.
A l’échelle nationale, au vu des estimations du nombre d’enfants non-scolarisés dans certains territoires de la République, et plus particulièrement dans ceux dits d’Outre-mer, l’UNICEF France recommande la création d’un Observatoire national de la non-scolarisation afin d’évaluer et de veiller à l’effectivité du droit à l’éducation des enfants et adolescents éloignés de l’école.
Rétention administrative des enfants
En 2022, 2 999 enfants ont été enfermés dans des centres de rétention administrative en France hexagonale et dans les territoires dits d’Outre-mer, dont 2 905 à Mayotte. Depuis 2012, la France a déjà été condamnée 9 fois par la Cour européenne des droits de l’Homme pour le traitement inhumain et dégradant des enfants dans ces centres. L’UNICEF France recommande au Comité d’exhorter la France à interdire tout recours à la rétention des enfants, peu importe le lieu et sur l’ensemble du territoire (centres de rétention, locaux de rétention, zones d’attente).
L’UNICEF rappelle également à la France la nécessité de mettre la procédure d’évaluation de l’âge en conformité avec le principe de présomption de minorité, et de maintenir les mineurs non-accompagnés dans le dispositif de protection de l’enfance.
Respect de l’opinion de l’enfant
La prise en compte de l’opinion de l’enfant est encore entravée par de nombreux obstacles culturels, politiques et économiques et leur implication dans la construction et le suivi des politiques publiques reste trop insatisfaisante. L’UNICEF France recommande la mise en place de mécanismes pérennes, inclusifs et soutenus par des ressources nécessaires pour permettre la participation effective des enfants au débat public, notamment dans le cadre de la prochaine réforme des institutions.
Le Comité des droits de l’enfant rendra ses observations finales début juin 2023, adoptant des recommandations urgentes à l’attention de l’Etat français.
« L’audition de la France par le Comité des droits de l’enfant est un moment essentiel pour amener le gouvernement à un travail effectif sur les nombreuses entraves qui existent encore à la réalisation des droits de l’enfant. De la protection des mineurs non-accompagnés à la lutte contre la précarité infantile ou encore à l’éducation de tous les enfants y compris dans les Outre-mer, aucun droit n’est une option. Il est urgent d’agir », affirme Adeline Hazan, présidente de l’UNICEF France.
Suivre l’audition de la France par le Comité des droits de l’enfant ICI.