Pour subvenir aux besoins de sa famille, Hamza travaille une fois par semaine. Comme des milliers d’autres enfants de son pays, il va encore à l’école, mais il commence peu à peu à s’en éloigner, pour aider sa famille sur le plan financier. Cependant, depuis le déclenchement de « la Révolution du Jasmin », il y a quelques semaines, le pays semble prendre conscience des injustices qui sévissent dans le pays.
Cadet d’une famille de trois enfants, Hamza a un grand frère et une petite sœur qui fréquentent une école privée. Lui aussi va en classe, mais un jour par semaine, il délaisse les bancs de l’école pour travailler au marché aux poissons de Tunis, comme un adulte. Ses deux parents travaillent, mais leurs revenus ne sont pas suffisants pour payer l’intégralité des frais de scolarité de leurs trois enfants.
Les bons jours, il peut gagner jusqu’à 10 dinars tunisiens (env. 5 euros). Mais il garde très peu de cet argent pour lui. « Je voudrais m’inscrire à une formation professionnelle », dit-il. « Je continuerais de travailler sur le marché pendant mes jours de congé afin de me faire un peu d’argent. Mais je voudrais vraiment apprendre un métier ». Des aspirations bien lointaines de celles des enfants qui vont à l’école et qui poursuivent leur scolarité jusqu’au bout.
Selon les données récentes, 98 % des enfants tunisiens en âge d’aller à l’école vont à l’école primaire. Pourtant, ils sont des milliers à abandonner l’école chaque année, en dépit du fait que l’éducation est obligatoire entre 6 et 16 ans. Rien qu’en 2009, 69 000 enfants tunisiens ont quitté l’école !
L’école doit passer avant le reste
Quand l’insurrection populaire, appelée désormais « la Révolution de Jasmin » a débuté, aucun membre de la famille d’Hamza n’allait travailler. Le couvre-feu, le manque de sécurité et l’absence de moyens de transport les ont obligés à rester à la maison pendant plusieurs jours. Selon Mehyar Hamadi, chargé de la Protection de l’enfance au gouvernorat d’Ariana, dans le Grand Tunis, les enfants qui ont quitté l’école avant 16 ans sont peu disposés, voire incapables, à reprendre leurs études.
D’après lui, « l’argent – ou plutôt le manque d’argent – est le plus souvent la cause du problème », explique-t-il. « La pauvreté, surtout quand elle est combinée au manque d’éducation ou de sensibilisation, est le ferment de la violence, de l’exploitation, des privations, de l’abandon et de toutes les formes d’abus envers les enfants ».
Il est difficile de dire combien d’enfants vivent des situations semblables à celle d’Hamza ou à celles que décrit Mehyar. En Tunisie, les statistiques constituaient depuis longtemps un point délicat et étaient censurées. Aujourd’hui, il semblerait qu’une prise de conscience commence à s’opérer dans le pays vis-à-vis des injustices qui perduraient jusqu’à présent.