« Tant de dignité, de chagrin, de désespoir et de résignation ». C’est le portrait que dresse Karine, cheffe du service communication à l’UNICEF France lors de sa visite en Somalie. Ces mots résument à eux seuls le drame que vivent des millions de familles.
La Somalie, terre de conflits, de violence et de famine, est aujourd’hui l’épicentre du réchauffement climatique qui ronge la Corne de l’Afrique. Sécheresse historique et inondations dévastatrices se côtoient, plongeant la population dans une situation alarmante.
Dans certaines régions comme le Puntland, au nord-est du pays, il n’a pas plu depuis 6 ans. Les récoltes sont maigres et le bétail est décimé. Les taux de malnutrition explosent et l’accès à l’eau relève désormais du défi.
Le constat est sans appel. La liste des crises qui frappent la Somalie s’allonge et fait des milliers de victimes parmi les enfants. Cependant, face à l’urgence de la situation le silence médiatique est assourdissant.
Pour cela, les équipes de l’UNICEF France se sont rendues sur place avec Vakita, le média de Hugo Clément. Nous avons rencontré des enfants et des familles qui manquent de tout et pour qui l’aide humanitaire est vitale.
Découvrez le reportage du média Vakita en Somalie
Sécheresse et famine : l’impuissance et le désespoir des habitants
Notre mission commence à Garowe, la capitale du Puntland. Dès les premiers instants, une chaleur accablante se fait sentir. Le vent est sec et le paysage est désertique. Ce sont là, les premières évidences de la sécheresse qui asphyxie la région depuis 6 ans.
En raison de l’aridité des sols, les rendements agricoles sont faibles. Les animaux ne survivent pas à la chaleur extrême et meurent par centaines. Les populations ont désormais tout perdu.
Ici, la crise climatique s’est enracinée et avec elle, la famine. En juin 2023, dans l’Etat du Puntland, 1,2 million de personnes étaient en situation d’insécurité alimentaire. Concrètement, cela signifie que la plupart des familles ne peuvent prendre qu’un seul repas par jour, parfois même aucun. Mais aussi, que la composition de ces repas elle-même est très pauvre sur le plan nutritionnel. Dans ce contexte où l’urgence climatique se conjugue à une crise alimentaire, les enfants sont les premières victimes.
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Enfants souffrent de malnutrition
Dont 68 310 en situation de malnutrition sévère aiguë
Cette crise climatique ravit la vie à de nombreux enfants. Pour les autres, l’urgence est maximale. C’est ainsi que des parents se lancent dans un long périple. Ils marchent des heures, voire des jours, à la recherche d’un centre de santé qui pourrait sauver la vie de leurs enfants. Lors de notre visite au centre nutritionnel de Garowe, difficile d’ignorer les regards fatigués des enfants et le désespoir de leurs parents.
Il a marché 26 kilomètres pour se rendre dans ce centre nutritionnel dans l’espoir de sauver son fils atteint de malnutrition sévère.
« Autrefois, raconte-t-il, tout allait bien. J’avais un troupeau de chèvres, mais elles sont toutes mortes à cause de la sécheresse. J’ai tout perdu, y compris deux de mes enfants ».
Son combat est celui que mènent des milliers d’autres parents. Dans leur lutte, l’aide de l’UNICEF est en quelque sorte, le dernier espoir. Ce centre en est l’exemple.
Il accueille des enfants de moins de 5 ans en situation de malnutrition aiguë sévère. Il dessert toute la région de Nugaal, au nord de la Somalie, avec ses 485 000 habitants. Ici, les enfants reçoivent des aliments thérapeutiques pour combler leurs carences et stabiliser leur état. Grâce aux traitements dispensés, 3 semaines suffisent pour sauver la vie d’un enfant et 8 semaines pour guérir.
L’urgence de l’accès aux soins
Une fois sortis de l’urgence vitale, chacun de ces enfants devrait pouvoir retrouver une vie normale. Pourtant, c’est loin d’être le cas. La malnutrition laisse des séquelles profondes. Les enfants demeurent fragilisés et peinent à retrouver leur santé.
« On pourrait croire au premier regard qu’ils ont les yeux clairs, mais non, leur cristallin est opaque ; une des nombreuses conséquences de cet état de dénutrition » témoigne Karine, en visite dans le centre de santé de Jilab, à quelques kilomètres de Garowe. Ce centre, avec ses espaces de vaccination, sa pharmacie et ses salles de consultation, a pour objectif de garantir l’accès aux soins.
Ici, les 11 000 habitants du camp de Jilab viennent pour des consultations en tous genres. Les enfants sont examinés pour identifier les potentiels signes de malnutrition, ils sont vaccinés et déparasités. Les mères, elles, sont accompagnées tout au long de leur grossesse. Elles sont également dépistées pour le VIH et les maladies sexuellement transmissibles. L’UNICEF fournit les médicaments essentiels et le matériel nécessaire pour les soins médicaux.
Exil climatique et les défis de l’accès à l’eau
On ne saurait raconter la sécheresse sans évoquer la question de l’accès à l’eau. Depuis 2017, les sources d’eau qui alimentaient les populations se sont asséchées. Une fois qu’elles tarissent, les familles n’ont qu’une issue : l’exil.
En septembre 2022, près de 88 000 familles sont devenues des déplacés climatiques. Laissant tout derrière elles, elles convergent vers les grandes villes telles que Garowe ou Bossasso au nord-est de la Somalie. Elles s’installent sur des terrains abandonnés qui deviennent rapidement des camps où s’entassent des milliers de personnes.
Désormais, leurs maisons se résument à quelques bâches étendues sur des branches. Dans ces camps souvent surpeuplés, tout est à faire. Il n’y a pas d’eau courante et quand il y en a, elle est souvent polluée.
C’est le défi auquel sont confrontés les habitants de Khaji Kheir à 140 km au nord-ouest de Garowe. Le seul puits qui existe – creusé par l’UNICEF – ne produit que de l’eau salée. Mais sans eau, rien n’est possible. Les enfants tombent malades, victimes de diarrhées aigües et autres maladies hydriques. Alors qu’ils sont déjà malnutris et malades, l’absence d’eau potable est une réelle menace pour leur survie.
Dans d’autres camps comme celui de Dangorayo, situé à 110 km à l’est de Garowe, nous avons mis en place un centre de santé qui abrite des points d’eau. Mais la quantité d’eau potable est insuffisante pour répondre aux besoins des 10 800 habitants. L’UNICEF a prévu, à court terme, en partenariat avec l’Agence de gestion de l’eau du Puntland, de creuser des puits supplémentaires.
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Sécheresse, pauvreté, famine, pénuries d’eau et déplacements de populations…les enfants manquent de tout. Ils ont besoin d’être nourris, soignés et protégés. Les enjeux sont importants mais la situation est réversible.
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