Dans une tribune parue aujourd’hui dans Ouest France, Adeline Hazan, présidente de l’UNICEF France, et Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité, alertent sur le nombre croissant d’enfants à la rue.
Paris, le 30 août 2023 – À quelques jours de la rentrée scolaire, dans la nuit du 21 au 22 août, au moins 1 990 enfants, dont 480 de moins de trois ans, sont restés sans solution d’hébergement à la suite de la demande de leur famille au 115, faute de places disponibles ou adaptées pour les accueillir : une augmentation de 20 % par rapport à l’année dernière.
Ces données ne sont pas exhaustives : nombreuses sont les familles qui ne recourent pas ou plus au 115 et la situation des mineurs non accompagnés sans abri, ou celle des familles vivant en squats ou en bidonvilles n’y est pas reflétée. Elles sont cependant révélatrices d’une persistance et d’une évolution inquiétante du sans-abrisme, et le signe d’une insuffisance des politiques publiques censées le faire disparaître. Sans compter que l’hébergement se fait trop souvent dans des hôtels qui ne sont pas des lieux de vie pour les enfants.
En dépit de la mobilisation des associations et des efforts importants consentis par l’État en faveur du parc d’hébergement, l’engagement de « ne plus avoir aucun enfant à la rue » pris par le gouvernement à l’automne 2022 n’a pas été durablement tenu. Pire, depuis le début de l’été, nous assistons à une multiplication des remises à la rue, témoignant de la persistance d’une gestion de l’hébergement au thermomètre.
Été comme hiver, la rue n’est pas un lieu pour les enfants
L’hiver est généralement un moment de prise de conscience sur le sort des personnes sans-abri. Cependant, celles-ci, en particulier les enfants, souffrent tout autant des conséquences des vagues de chaleur, plus récurrentes et intenses en raison du changement climatique : brûlures, déshydratations, insolations, augmentation des hospitalisations et des décès…
N’oublions pas que la rue constitue un environnement hostile et violent en toute saison, privant les enfants de conditions de vie dignes et sécurisantes et de leurs droits fondamentaux.
Comment ces milliers d’enfants, sans abri ou menacés de le devenir, peuvent-ils appréhender sereinement la rentrée et suivre une scolarité « normale » dans un quotidien dicté par l’instabilité et la peur de ne pas savoir où dormir ?
Les enfants ne peuvent plus attendre
Combien de fois encore ce baromètre virera au rouge avant que le gouvernement tienne ses engagements et respecte pleinement la Convention internationale des droits de l’enfant ?
Nous alertons une nouvelle fois, en amont de l’examen du projet de loi de finances, afin que cessent les coupes budgétaires qui se traduiraient par des suppressions supplémentaires de places d’hébergement, perspective incompatible avec toute ambition de réduction du sans-abrisme. Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur la situation urgente de ces 2 milliers d’enfants.
En écho aux recommandations du Comité des droits de l’enfant, nous appelons le gouvernement à s’en saisir, sans délai, et à mettre en œuvre une politique pluriannuelle de lutte contre le sans-abrisme, dotée de moyens suffisants pour que tous les enfants soient hébergés ou logés dans des conditions conformes à leur intérêt supérieur et que plus aucun d’entre eux ne dorme à la rue.